25.12.10

Fêtes de fin d'année

Un joyeux Noël à tous et une très bonne année !

Désolé, pas beaucoup de mise à jour du site depuis quelques jours mais, comme tout le monde, j'ai des verres à boire, des choses à fêter, et puis un point de chute pour le réveillon du jour de l'an à trouver. 
Bref un programme chargé, et puis, moi aussi j'ai le droit d'être en vacances, non ?

18.12.10

Carnet de Bord - Photos - Salvador de Bahia (suite et fin)

10h00 - Aéroport de Salvador de Bahia - 17 Décembre 2010

Voilà un aéroport de plus à ajouter à ma collection de gares routières et autres lieux de transit.
Plus ça va et plus j'aime ces endroits. Tous les gens se croisent, on se demande sûrement tous d'où on vient et où on va.
La tristesse de quitter le lieu se mêle à l'excitation d'en découvrir un autre. Un pied dans le passé, l'autre dans le futur, et on attend là que le premier daigne rejoindre le second.
J'atteins une étape importante de mon voyage. Je quitte une ville pour laquelle j'ai eu un gros coup de coeur, pour rejoindre celle que tant de gens veulent visiter au moins une fois dans leur vie.
Le genre de cité de tous les rêves, espoirs et dangers, comme pourraient l'être Paris, New York ou Hong Kong.
Naturellement je trépigne d'impatience à l'idée de découvrir ça par moi-même.

Mais revenons à Salvador.
3 jours passés là bas, plus un en bonus quelques jours avant. Toutes les journées ont été intéressantes à des points de vue différents.

Le premier a servi à prendre mes marques, j'ai sympathisé avec un guide du coin avec qui j'ai tapé la discute chaque autre jour.
Ricardo, l'homme qui m'appelait "Monsieur Français" en criant en pleine rue. Difficile de passer inaperçu quand on se voyait, donc.

Le premier jour du "vrai" séjour était le Mardi, jour réputé comme le plus animé de la semaine. Et la ville a répondu présente à sa réputation.
Après le voyage de nuit depuis Lençois, où j'avais encore hérité d'un ronfleur professionnel comme voisin, j'ai passé une bonne partie de la journée à dormir. Mais une fois réveillé, tout s'est enchainé.
18h, messe dans une église du Pelourinho. Je suis en train de finir ma canette (Coca Light, un jour nous nous retrouverons, et ce sera bien) avant d'entrer, quand le prêtre me croise.
"Inglês ?"
"Não, Francês"
"Ah, je connais la France !"
Un prêtre noir, brésilien, qui baragouine le Français, voilà qui est original.
On discute rapidement avant que la messe commence. Il me donne des infos sur les cérémonies de Candomblé, une religion afro-brésilienne, mélange de catholicisme et de spiritisme africain. Dans ce genre de cérémonies, on amène des percussions dans l'Eglise, et il me dit que c'est quelque chose à voir. Mais ce ne sera pas aujourd'hui. J'en prends bonne note.

Je reste une heure dans l'église, puis je rejoins d'autres français sur des marches joignant 2 rues adjacentes, en bas d'une autre église.
On y installe une scène pour un concert gratuit en pleine rue. Très bon.
On attend environ une heure, puis les musiciens commencent à monter sur scène. Ils s'échauffent gentiment sur des rythmes afro-brésiliens. Après quelques minutes un type au look invraisemblable monte sur scène.
Son look est un mélange de soutane et du costume de Travolta dans Saturday Night Fever. Il doit avoir la soixantaine, cheveux blancs et queue de cheval, plume violette au somment du crâne.
S'il n'avait pas eu un trombone et une voix de dingue, on aurait pu penser à un canular.

Et là, tout le monde se lève et plus personne ne se rassira. Les marches se remplissent et bientôt elles deviennent une piste de danse géante.
Tout le monde danse avec tout le monde, sourire aux lèvres, la musique ne s'arrête pas pendant deux heures, même quand une coupure de courant éteint les éclairages publics. Ambiance électrique.
Et quand ils décident de jouer un bon reggae des familles, j'en ai presque les larmes aux yeux tellement ça fait du bien de voir, d'entendre, de vivre ça tout simplement.
Chez les Romains, on apaisait la plèbe avec du pain et des jeux. Le Mardi soir à Salvador, il suffit de quelques bières et de la musique, les locaux feront le reste.
C'est la première fois depuis que je suis au Brésil que je ressens une telle énergie positive comme ce soir là.

Et puis il fallait encore un petit coup de chance puisqu'au détour d'une rue, une fille me saute dessus. 
Je vous vois déjà venir, et non vous n'aurez pas de photos, et non ce n'était pas pour profiter de moi.
C'est Elsa, la française avec qui on voyagé jusqu'à Praia da Pipa avec Mark, son copain Irlandais. Ils avaient décidé d'aller à Olinda, moi à la Chapada Diamentina et à priori on ne devait plus se recroiser avant qu'ils repartent en Europe. Et bien si.
On décide d'aller boire un verre pour fêter ça. Ils sont avec deux anglais, une fille et un mec.
Je ne me méfie pas mais le type est en train de me faire un remake du gay trap de Jericoacoara et je reste donc sur mes gardes par la suite.

On enchaine la fin de soirée dans un bar de Salsa. Une fois dedans, les deux anglais payent leur tournée de Sangria, et, pour être  honnête, je crois que c'était un des trucs les plus infects que j'ai bu de ma vie. On aurait dit de la vinaigrette à salade. A ce niveau là, je crois qu'il aurait presque fallu les remercier de ne pas y avoir ajouter de la moutarde.
Bref, après 2 gorgées, j'ai commandé une bière, investissement bien plus sûr.
Un coude sur le comptoir je prends la température du lieu. Et je ne suis pas déçu.
Déjà, c'est un groupe qui joue en live, et ça fait une sacrée différence. Et encore une fois, tout le monde danse avec tout le monde, ce n'est pas la guerre de la reproduction comme ça pourrait être le cas dans ce genre de bars en Europe. En fait on se croirait dans le clip de Get Busy de Sean Paul. Ces mêmes blacks aux bras énormes, ces mêmes blacks aux fesses et aux seins énormes, et quelques gringos par ci par là qui essayent de tirer leur épingle du jeu.
Moi quand je les vois tous danser, je me résous à aller chercher une autre bière. 

Mark nous gratifie de ses fameux pas de danse venus des highlands dont lui seul a le secret. L'anglais a semble-t-il lâché l'affaire avec moi et s'attaque maintenant à une jolie hollandaise. Il bouffe à tous les râteliers et c'est tant mieux pour lui.
Après trois heures passées dans le bar il est temps de faire les finalement officiels adieux à mes fidèles compagnons de route, qui repartent en Europe le lendemain matin.
Rendez vous pris à Londres, à mon retour, pour passer quelques jours avec Crasy Charlie, l'ougandais au rhum cubain, mon coéquipier à Jeri Gay Fort Boyard, qui vit là bas.

Deuxième jour, je change d'auberge pour rejoindre celle d'Hostelling International, qui est à tous points de vue largement meilleure.
Mais c'est un peu l'usine à touristes là dedans et vu le peu de temps qu'il me reste à passer à Salvador je ne me sens pas obligé d'aller me faire des potes.
Je partage le dortoir avec un allemand qui vit à Sao Paulo, super sympa. Décidément ces allemands me dégoutent à savoir si bien parler anglais.
Bref cette seconde journée sera consacrée au rienfoutage intégral, petites balades dans les rues, j'essaye de faire des repérages pour faire des photos le lendemain.

Le soir je me fais harponner par la serveuse du resto d'à côté, qui veut absolument que j'y vienne manger. Je m'exécute.
La fille est super sympa, on discute pendant que j'attends ma pizza, et elle me dit que si je reviens demain, j'aurais le droit à un plat & prix spéciaux et à une caïpirowska gratuite. 
Manifestement, celle jolie fille sait parler aux hommes. Tout du moins à un client...
A ce moment là le cuistot débarque, me demande si tout était bon. C'est un allemand plutôt baraque, et accessoirement c'est surtout le mari de la serveuse. Ok. 
Je leur promets de revenir le lendemain.

3ème jour.
Matinée occupée à prendre des photos. Mais je suis  choqué de voir tous ces touristes, vieux riches bedonnant, avec la parfaite panoplie calvitie/coups de soleil, polo/bermuda et chaussettes/sandales. Appareils hors de prix en bandoulière, ils mitraillent les locaux comme on le ferait avec des animaux dans un zoo.
Aucun respect, ils ne demandent pas d'autorisation, ne disent pas bonjour ni merci. Ils s'approprient ces gens comme on remplit son assiette dans un self service.
Leur attitude est à gerber et quand je passe derrière eux force est de constater que je loupe des clichés incroyables...

J'ai des envies de meurtre et je décide de sortir des sentiers battus. Une petite rue adjacente à la principale, remplie d'ateliers, sera ma cible.
Sauf qu'un de ces vautours me suit, et menace ma petite entreprise. Je rentre dans un atelier, il me suit encore.
Je fais style de regarder les tableaux, le mec lui va directement shooté le peintre qui travaille là, tous flashs dehors, sans rien dire.
L'artiste cache son visage derrière ses mains.
Le type restera bien 3 minutes appareil braqué, en espérant peut être que l'autre aura une crampe ou quelque chose. Mais non.
Il prend quand même la photo et se barre en marmonnant, comme un gamin à qui on aurait refusé un bonbon.

Moi je reste là dépité, je me dis que je suis encore bon pour faire demi tour en ayant laissé passé l'occasion d'avoir une super photo. 
Et puis en fait le peintre me demande si moi aussi je suis venu faire une photo. Je réponds en portugais et il est tout étonné.
Je lui dis que je voulais en faire une mais que vu comment l'autre connard s'est comporté je me suis résolus à pas la prendre. Il me dit qu'il a l'habitude. 
On discute alors un peu et puis il finit par me dire que si je veux prendre une photo de lui il veut bien prendre la pause. Je suis ravi. Je prends le cliché, le remercie et on se serre la main. 



Malheureusement ce sera une des seules fois où un local acceptera à quelques exceptions près.



Et puis il y a un certain type de misère dans les rues du Pelourinho et même si je prends une ou deux photos pour l'illustrer, rapidement je ne me sens pas à l'aise et je décide de rentrer.


L'après midi, session shopping de souvenirs au Mercado Modelo, sorte de halle où les tous les touristes, dont moi, s'entassent. Mais il est facile de négocier les prix alors j'en profite.

Je dois me lever à 7h le lendemain pour prendre mon avion pour Rio, je prévois donc juste de manger au restaurant de la veille et d'aller me coucher.
Comme convenu, j'ai le droit à un plat & tarifs spéciaux. Je suis le seul client, du coup on passe une partie de la soirée à discuter avec le couple de proprios.
On boit quelques verres ensemble puis je dois rentrer.
Voilà comment s'achève mon séjour Bahiannais.
Je suis maintenant dans l'avion et dans 1h je foulerai la terre de Rio. J'ai hâte.


16.12.10

Carnet de Bord - Pipa, Salvador, Chapada Diamentina, Salvador

J'ai donc fini par mettre un terme à ma conquête des plages de la côte Est. Si Jericoacoara a été un lieu exceptionnel d'un point de vue ambiance et rencontres amicales, Pipa a été un lieu exceptionnel d'un point de vue plages et rencontre fondamentale.
Deux villes différentes où je compte bien revenir un jour avec les ami(e)s pour se la couler douce pendant quelques jours.

Une petite indication en passant, je pense que l'auberge de jeunesse Pipa Hostel est la meilleur qu'il m'ait été donné de fréquenter. Un accueil parfait, une localisation idéale, une piscine, des gens super sympas, une cuisine nickel... C'est comme le Club Med sauf que ça coute seulement 10€ la nuit. Il a été dur de quitter cet endroit et cela rend fades les autres auberges dans lesquelles je suis resté depuis...

J'ai quitté Pipa au petit matin, plus un sous en poche, distributeur fermé, j'ai donc quémander quelques reals pour pouvoir prendre mon bus qu'une espagnole super sympa a bien voulu me donner. Ouf.
On ne reviendra pas sur mes 2 jours à négocier avec les compagnies aériennes brésiliennes pour essayer de leur faire comprendre que ce n'était pas parce que j'étais un gringo qu'il était normal que je paye 3 fois le prix que payerait un brésilien pour aller de Natal à Salvador. Mais le brésilien est têtu, manifestement.
2h de bus pour rallier Natal donc, et ensuite reste à me taper les 20h  de bus officiellement annoncées entre Natal et Salvador, voilà le premier extrait du fameux petit carnet.

Bus pour Salvador - 9 Décembre 2010
Je quitte Pipa sous les nuages après une semaine passée là bas. Après 2h de bus pris au petit matin, je quitte Natal 2h plus tard, sous la pluie, direction Salvador.
L'objectif est périlleux : rallier la capitale Bahianaise à temps pour prendre le bus vers la Chapada Diamentina directement.
Si le bus n'arrive pas dans les délais prévus ça sera encore une journée de plus perdue à cause des transports. C'est le jeu mais le jeu peut s'avérer vraiment cruel.
J'ai fait mes au revoir à Elsa et Marc, le couple avec qui je voyageais depuis Sao Luis. Presque 2 semaines passées ensemble, pour ce type de voyage c'est une éternité.
Je retrouve les joies du voyage en solo mais pour autant mon moral ne s'en retrouve pas affecté.
Il faut dire que maintenant la route est toute tracée puisque j'ai une réservation d'hôtel à Rio pour le 17. J'ai donc 8 jours pour trekker la Chapada Diamentina, explorer Salvador de Bahia et me rendre à Rio. Autant dire qu'il ne faut pas que je traine.
S'il y a bien une chose qui me rend triste en revanche, c'est le temps. Cela fait presque 2 mois et demi que je n'ai pas vu la pluie à quelques épisodes près et depuis que j'ai quitté Pipa elle n'a pas quitté ma route. Il ne m'a pas fallu longtemps pou devenir aussi aigri qu'un Parisien. Mais comme je les comprends, en fait.
Je comprends la chance de vivre à Montpellier, et comme le soleil peut affecter les moeurs.
Quand vous partez au boulot et que vous savez que quoi qu'il arrive en sortant vous pouvez être à la plage en moins de 30 minutes, ça aide à garder le moral.
J'arrive à Salvador avec 2 heures de retard, je louperai donc mon bus pour Lençois.
Mais ce qui occupe mes pensées quand nous atteignons la ville ce n'est pas que pour le 3ème jour consécutif j'ai envie de brûler les transports en commun du Brésil avec un lance flammes artisanal, non c'est plutôt que pour la première fois je vois s'étendre sur des kilomètres, des impressionnantes favelas.
Toutes ces collines à l'entrée de Salvador en sont recouvertes, c'est une image incroyable.
Quand vous regardez Cidade de Deus ou Tropa de Elite, les favelas font peur à cause de la violence qu'on vous montre. Maintenant que je les vois en vrai pour la première fois depuis que je suis au Brésil, les favelas font peur parce qu'elles existent vraiment. Ce que vous voyez dans le film avec cette jolie photographie, ce soleil brillant, diffère beaucoup de l'image qu'elles donnent sous la pluie à travers le carreau d'un bus.
Quand vous voyez pour de vrai sous la pluie cet amoncellement de baraques de briques, sorte de badaboum grandeur nature, vous comprenez que la réalité est différente. Cruelle. Massive.
C'est une ville dans la ville, et je n'ose imaginer la vie que peuvent avoir ces gens là.
On traverse ces endroits pendant de longues minutes, comme si le chauffeur voulait être sur qu'on échappe pas à cette réalité.
Puis on arrive enfin à Salvador, après presque 24h de trajet. Il est 9h du matin, le prochain bus pour Lençois est à 16h30, j'ai donc environ 8h à tuer.
Je laisse mes bagages à la consigne et rejoint le centre historique, dit Pelourinho, en taxi. Je discute pas mal avec le conducteur pendant le trajet, résultat il me laisse sa carte en me disant : "Je t'aime bien, si t'as besoin d'un taxi, tu m'appelles, je te fais moitié prix sur la course." Euh, OK, merci vieux.
Arrivée au Pelourinho, bon feeling avec l'endroit. Un guide me propose une balade et je lui dis que je n'ai pas d'argent. Au final il me fait quand même faire le tour gratos parce que je parle portugais et que pour un touriste c'est rare. Cool donc.
Nombreuses églises, rues pavées qui montent et qui descendent, et puis on descend une grande allée et là le type me dit de me retourner.
" - Tu reconnais l'endroit ? 
- Euh, non...
- Michael Jackson, tu connais ? "
Et là ça fait tilt. Clip de They Don't Care About Us, Michael Jackson avec un t-shirt d'Olodum, le groupe de percussions qui fait la musique du clip. Et bien c'est dans l'allée où je me trouve que ça a été tourné.
Ah ouaih, on dirait pas mais ça fait quelque chose quand même.
Je continue ensuite de me balader seul et puis vers 14h15 je me tente le retour à la gare routière en bus de ville.
Mauvaise idée.
2h plus tard je suis toujours dedans, sans gare routière en ligne de mire. 
Si je loupe mon bus je me mets 60 reals dans l'os et je me tape encore 7h d'attente jusqu'au prochain. Hors de question quoi.
Finalement je sors du bus 10 min avant l'heure de mon bus sauf que j'ai encore une voie rapide à traverser pour atteindre la gare routière. Je prends les passerelles en courant, le petit blanc qui court au milieu de tous les brésiliens qui me regardent sans trop comprendre.
Finalament j'arrive à 16h31 à la plateforme d'embarquement, le conducteur est en train de fermer les soutes à bagages. J'arrive à négocier pour qu'il m'attende le temps que j'aille récupérer mes affaires au dépose bagages. A contre coeur il accèpte. Ouf.
Arrivée à Lençois à minuit, sous la pluie, encore. Il est trop tard pour réserver un trek pour le lendemain, ce sera donc une journée de plus de perdue. Mais bon, la loi des séries, il parait.

Lençois, petite ville franchement assez jolie, calme, au milieu du parc national de la Chapada Diamentina, réputé pour ses paysages, cavernes, grottes et autres chutes d'eau... Sur le papier, ça donne envie.
Sauf que donc mon premier jour, je n'ai rien à faire, et on fait le tour de la ville en 1h... Il n'y a pas de courant dans l'auberge ce jour là. Pas de photoshop, pas de films, pas de Football Manager pour tuer le temps. J'ai déjà lu tous mes bouquins. Il n'y a pas de cyber café. Il pleut. Bref on se fait cruellement chier quoi.
Au final j'essaye de dormir au maximum, et puis je regarde la pluie tomber. Alors le temps passe pas vite, mais bon, l'avantage du temps c'est qu'il s'écoule quoi qu'il arrive donc la fin de journée finit par arriver. 

Auberge de Lençois - 13 Décembre 2010
Dernier jour dans la Chapada Diamentina...
Le temps a été pourri tous les jours, l'auberge est presque insalubre, heureusement l'ambiance a un peu rattrapé tout ça...
Je n'ai donc rien fait le premier jour à cause du bus, deuxième jour, trek d'une journée pour voir différents spots du Nord et de l'Est de la Chapada.
Tout commence sous la pluie. Arrivé au premier endroit le niveau de l'eau est trop haut pour traverser la rivière, on doit donc zaper ce qui était censé être le plus lieu de la journée...
On enchaine sur la montée au sommet d'une falaise qui doit nous permettre de voir l'ensemble de la Chapada sur 360°.
Arrivés en haut la vue est superbe, mais les nuages bas empêchent de bien voir les alentours. Je prends quelques photos tant bien que mal et alors que tout le monde s'extasie, moi ça me rappelle les hauts plateaux de la Lozère, en un petit peu mieux quand même. Quoi qu'il en soit dans les deux lieux le temps est le même.
On s'arrête ensuite pour manger, et on enchaîne sur la visite d'une rivière souterraine qui refait ensuite surface pour forer un lagon d'eau cristalline.
L'endroit est plutot exotique mais si la vue de la caverne d'où émerge la rivière laisse présager le meilleur, le lagon est lui assez banal, d'autant plus que l'eau est en fait assez trouble.
Normal nous dit la guide, à cause de la pluie, un des affluents de la rivière la remplie de sédiments et la rend légèrement marron. Ok.
Certains entreprennent une baignade mais rapidement une grosse averse s'abat de nouveau sur la zone et on est forcés d'aller s'abriter un peu plus loin.
On enchaine ensuite sur un lagon abrité par une caverne. L'eau a la particularité d'être bleu, et la visibilité sous marine, totale. L'agencement du dévert pour y descendre fait que le soleil l'éclaire de façon à former une sorte de croissant de lune bleu turquoise à sa surface.
Pas pendant cette période de l'année, nous dit la guide. De toute façon même si on était à la bonne période, il pleut. Ok bis.
On finit la visite par l'exploration d'une immense grotte.
Pour y accéder on descend le long d'une falaise ocre qui me rappelle les plus belles années d'Indiana Jones. On arrive ensuite à l'entrée de la grotte, sorte d'énorme tunnel s'enfonçant sous le roc.
Encore une fois je suis plutôt déçu, car en dehors de son imposante grandeur, les stalagmites & tites et autres joyeusetés ne sont pas légions. Pas franchement inoubliables non plus.
L'éclairage à l'unique lampe de poche made in Monoprix (ou son équivalent local) ne doit pas aider non plus à apprécier l'architecture.
Honnêtement je pense qu'on peut trouver plus sympa à St Guilhem du désert...
On remonte sous la pluie (mais ai-je encore besoin de le préciser... ?) et on rentre à l'auberge.
Bref pour un trek à 100 reals, j'avoue l'avoir un peu mauvaise, et surtout l'impression d'avoir un peu été pris pour un con, étant donné qu'il a l'air de pleuvoir depuis un moment ici, et qu'il n'aurait pas du être très difficile de se renseigner à l'avance sur l'accessibilité des lieux, et le cas échéant, remplacer certaines visites par d'autres.
J'avais prévu un autre trek aujourd'hui mais il s'agissait de gravir 2 km de dénivelé puis de marcher 4 km sur un plateau pour atteindre une énorme chute d'eau. Sauf que 200 mètres avant d'atteindre l'objectif il y a une rivière à traverser. Vue que la pluie ne s'est pas franchement arrêtée, il n'y pas de raison que celle là soit plus facile à traverser.
Et payer 100 reals de plus pour me taper 12 km de marche allez retour en ayant du faire demi tour à 200 mètres du but est au dessus de mes forces et de mes moyens.
Je ferai donc une balade tout seul, au moins je n'ai pas à payer, ni personne d'autre que moi sur qui pester si je n'atteins pas mon but.
Le lendemain, un des mecs de mon dortoir est revenu le soir du trek que je devais faire. Et comme je l'avais imaginé, ils ont du faire demi tour avant d'atteindre la cascade, et il a passé plus de 4h dans un mini bus pour essayer de trouver une visite à faire, sans succès. 
Pas de regrets donc.
Au final je ne vais pas faire ma mauvaise langue, les paysages sont superbes, et avec du beau temps ils doivent encore prendre une autre ampleur...
Mais vu les efforts consentis pour arriver jusqu'ici, qu'ils soient financiers ou organisationnels, j'étais en droit d'attendre mieux.
Mais bon, tant pis, on ne peut pas avoir de la chance à chaque fois.
Je reprends le bus de nuit pour Salvador, 3 jours à passer là bas, en espérant pouvoir en profiter un peu plus...
Je voyage de nuit avec 3 autres français. L'un d'eux a déjà une auberge sur Salvador, on décide donc de tous s'y installer.
L'auberge n'est pas mal mais sans plus. Je partage une chambre avec un des mecs. Il part le soir même, je devrai donc changer de chambre demain.
Sauf que quand je rentre le soir après une bonne fiesta, je me rends compte que le type est parti en ayant pris le malencontreux soin de boucher les toilettes. Je changerai donc d'auberge à la première heure demain.

Je m'arrête là pour l'instant. A suivre, le compte rendu de cette fameuse première soirée, et puis des 2 journées qui ont suivi.
Je quitte Salvador demain pour Rio, l'apogée de ma traversée du Brésil, peut être.



Photos - Pipa & Chapada Diamentina

Voila une petite photo de Praia da Pipa (il n'y a que celle là et les panoramiques précédents pour les photos de là bas) et le début des photos de la Chapada Diamentina...
La galerie photos est pas encore mise à jour mais ça devrait être fait en même temps que la mise à jour du carnet de bord.
(cliquez pour agrandir...)








15.12.10

En tete a tete avec moi meme ...

On voit chaque minute s'écouler comme autant de kilomètres avalés par ces bus que l'on prend et qui deviennent des hôtels de fortune.
On parcourt des distances qu'en France on ne voudrait même pas faire en train. Tel est le prix à payer pour découvrir toute l'étendue du monde.
On se rend alors compte qu'on n'est pas grand chose, que notre temps imparti est si court rapporté à la trop grande humanité.
Vous commencez à apprécier le plat qu'on vous amène déjà le dessert, espérant que le repas vous aura passablement comblé au moment de payer l'addition.

Je n'ai plus aucune notion du temps ou de l'espace. Les jours ne signifient plus rien, je n'arrive même plus à les compter. Bientôt 3 mois et j'ai déjà parcouru l'équivalent de la moitié de l'Europe. Qu'il me parait loin le temps où on pestait pour 30 minutes d'embouteillage boulevard du jeu de paume, clim à fond, Radio Nova en fond.
Qu'il est loin le temps où passer une journée à rien faire n'avait pas d'importance. Où vous pouviez dépenser en un McDo ce qui vous suffirait ici à être nourri et logé pendant 1 jour.
Où vous pouviez payer cette bouteille de vodka que vous n'appréciez même pas le prix que vous payeriez pour manger viande et légumes pendant 1 semaine dans une ville comme Macapa.

Comme on réapprend à se lever le matin comme pour se persuader pour la première fois qu'une journée dure bien 24 heures
Qu'entendre la voix de sa mère devient un exutoire alors que c'était à contre coeur que parfois avant vous aviez une discussion.

Quand vous vous rendez compte qu'être seul ne dépend que de vous, que les rencontres n'attendent qu'une initiative.
Quand une discussion autour d'une bière transforme de la compagnie en compagnons de route, le temps de traverser quelques villes.
Quand il n'est plus question de temps investi ou d'intérêt, mais seulement de vivre l'instant défait de toutes notions matérielles, de toute urgence temporelle.
Quand on réapprend à être indépendant affectivement, qu'on quitte ces compagnons pour en trouver d'autres le lendemain.
Quand vous vous couchez avec l'envie de rester, quand vous vous réveillez avec l'envie de partir, parfois l'inverse.
Quand les jours se transforment en noms de ville, les distances en heures de bus, que les lits deviennent des bancs, des sièges inclinables, des hamacs.
Quand le luxe revient à choisir la climatisation plutôt que le ventilateur.
Quand finalement vous n'y prêtez même plus attention
Quand vous regardez vos photos et constatez qu'elles ne représentent pas 10% de vos meilleurs souvenirs.
Quand vous vous surprenez à commander du poisson dans un restaurant juste parce que vous avez mangé riz et poulet midi et soir la semaine précédente.
Quand vous regardez en arrière et que vous semblez avoir tant vécu, et que vous n'avez même pas atteint la moitié de votre voyage. Vous qui réviez de faire le tour du monde réinterprétez maintenant la dose de courage et d'indépendance nécessaire à une expédition de cette trempe.

Comme chaque pas vous enfonce un peu plus loin dans l'inconnu, dans le monde extérieur comme intérieur.
Que vous vous remettez à penser à votre enfance, votre famille, vos copains de primaire, votre première boom et puis le premier bisou.
La première cuite, le premier joint, les problèmes, la lancinante descente qui vous a amené à partir.
Votre passion pour l'herbe toujours plus verte chez le voisin, et de ces temps pas si anciens où vous étiez si naïfs.
La solitude qui vous fait penser et ces pensées qui vous force à murir, comme forçant vos yeux à s'ouvrir un peu plus au fur et à mesure que le monde défile sous vos pieds.
Repenser à ces choses qu'on pensait si graves, celles qu'on jugeait presque mortelles, ces filles pour lesquelles on est devenu fou, celles qu'on a aimé puis insulté, qu'on a maudit à jamais mais dont on ne peut s'empêcher de penser à nouveau, oubliant le passé et imaginant un futur nouveau.

On repense à ces gens qu'on a laissé sur le bord du chemin et qui auraient pourtant sûrement avantageusement remplacé quelques livres dans votre sac à dos.
On repense à sa famille dont on a eu la prétention de dire qu'on ne l'aimait pas.
On repense à tous ces caleçons qu'on a laissé trainé par terre pour inconsciemment provoquer le conflit avec sa mère.
On repense à toutes ces fois où on a croisé ce père qu'on jugeait absent et on se rend soudain compte qu'on ne s'était jamais demandé pourquoi.
On repense à cette ignorance feinte stratégiquement, à ces heures passées à lire aux toilettes, parce qu'on était pas capable de parler.
On repense à ce frère et cette soeur qui ont eu l'air d'exister seulement quand j'ai compris qu'ils en étaient dignes.

Que j'ai pu être prétentieux.
Que cette intelligence a pu m'autopersuader de tant de choses qu'aujourd'hui je renie.
La maturité n'est pas une chose que l'on s'octroie de droit, ou comme récompense d'une rigueur mentale à toutes épreuves.
On comprend alors qu'elle s'apprend comme une leçon, se conquiert comme un territoire.
Elle vous adoube mais vous ne pouvez la ravir de force.

Je me rends compte aujourd'hui à quel point j'ai pu me tromper sur beaucoup de choses.
Comme j'ai pu me persuader qu'en me pensant infaillible je l'étais effectivement devenu.
Comme je voudrais pouvoir m'excuser auprès de certain(e)s.
Pas revenir en arrière, car j'aurais certainement refait les mêmes erreurs, ou d'autres. Non, j'espère juste améliorer encore et toujours ces fondations qui m'ont en définitif toujours fait défaut.

J'espère juste me souvenir de ça suffisamment longtemps pour que ça ait de l'influence.
J'espère juste que les messages envoyés à mon cerveau sont correctement analysés, interprétés, enregistrés et réutilisés.
J'espère que ce rêve n'en est pas un.
J'espère que cette magnifique reprise de Tracy Chapman que j'entends à l'instant ne me fera pas oublier l'original.
J'espère que le moi original ne sera pas oublié par l'actuel. Car tout n'était pas à jeter.

Je fais une mise à jour de moi même, j'espère que, comme ces nouvelles versions qui brillent de mille feux, je ne serai pas au final rempli de bugs, au moment d'en utiliser toutes les ressources.
J'espère ne pas avoir créer un nouvel ersatz de moi même, comme pour réussir à me leurrer une fois de plus.

Je suis tellement fasciné par ce que je peux produire, penser, écrire depuis quelques temps que je me demande si ça avait toujours été là où si, à la manière de ces autistes, le choc a été tellement puissant que j'ai commencé à utiliser de nouvelles parties de mon cerveau.

J'aimerais que toute cette magie, toute cette inspiration ne me quitte jamais.
J'aimerais écrire des milliers de pages en ayant toujours quelque chose à dire, un message à faire passer, un style qui m'est propre.
J'ai tellement peur que tout s'arrête, qu'une fois la distance annihilée je redevienne le procrastinateur professionnel que j'aimais tant être.
Je suis tellement touché par tous ces compliments, par toute l'attention que ces écrits et ces photos suscitent que je ne peux plus faire autre chose.

Ce livre, il faut que je l'écrive, ces photos il faut que je les prenne.
Après la musique j'ai trouvé deux nouveaux moyens de communiquer, mais pour ceux là je n'ai pas à prendre de cours, pas à faire de gammes pendant des heures, pas de répétitions.
J'ai l'impression de pouvoir juste poser un stylo sur du papier et le reste coule de source.
J'ai juste à poser un doigt sur un bouton, à viser dans l'objectif, et l'essentiel est fait.
Les choses les plus instinctives sont souvent celles qui vous touchent le plus.
Peut être que c'est cette simplicité qui touche.
Je ne m'embarasse plus de fioritures, de faire semblant, de principes.
Je laisse libre cours à mon propre style sans bien savoir s'il existe.

J'écris ma propre histoire, il n'y a rien de plus simple en fait.
Comme l'a dit le vieux sage de Pipa, les mots deviennent des phrases, les phrases des histoires, les histoires des livres.
Il n'y a pas de mauvaise autobiographie, peut être seulement des mauvaises vies ou de mauvaises manières de les raconter.
Je n'entoure plus la mienne de guirlandes, en attendant que le Père Noël vienne y apporter sa bénédiction.
"L'honnêteté est la clé de tout"
Pour être intéressants soyez honnêtes.
Les masques finissent toujours par tomber et ceux qui les rattrapent sont en général déçus de voir la vraie face de leur ancien propriétaire.


Et puis après ce pavé, des nouveaux panoramas pour se vider la tête. (n'hésitez pas à les agrandir, la résolution n'est pas celle d'origine, mais ça devrait être pas mal quand même...)
Bien à vous, messieurs, dames.







A suivre, les aventures à Salvador et Chapada Diamentina, une petite photo de Pipa, et les premières photos de la Chapada...

8.12.10

"Je vais mourir" - De ces rencontres qui changent votre vie

Pour la mise en place, je suis maintenant à Praia da Pipa, une petite ville de bord de mer aux plages magnifiques.
J'ai tenté de passer quelques jours à Natal, une métropole non loin d'ici, mais après mon séjour dantesque à Jericoacoara je ne pouvais me résoudre à m'entourer de béton, ne serait-ce que quelques jours.
Roel, le belge que j'avais rencontré là bas m'avait fait une telle pub sur Pipa, comme sur l'auberge de jeunesse où je réside actuellement, que je ne pouvais pas faire autrement que d'y passer.

Et me voila, j'avais prévu de partir Dimanche, puis Mardi, puis ce matin, et au final IL FAUT que je parte demain, sinon je ne quitterai jamais cet endroit.
L'auberge tout d'abord, c'est un petit coin de paradis, dans le paradis lui même. Piscine, grande cuisine ouverte à disposition, home cinema, sanitaires en état parfait, énorme table à manger ou pour prendre l'apéro, plein de CDs de Bob Marley, bref c'est comme à la maison sauf qu'on est au Brésil.

Tous les gens que j'ai rencontré ici sont adorables, des australiens, irlandais, français, allemands, brésiliens, italiens... L'ambiance est conviviale, respectueuse. Ma meilleur expérience en termes d'auberge de jeunesse depuis le début de mon voyage. Le Belge n'avait pas menti.

L'endroit en lui même maintenant, une rue principale avec des dizaines de bars, tous superbes et atypiques. Rues pavées, grandes fresques sur certains murs, capoeira sur la place principale. Ca c'est pour la partie ville. 
Le meilleur est à venir : 7 plages différentes, accessibles à différents moments de la journée en fonction des marées, toutes plus belles les unes que les autres. On se croirait dans le film La Plage, sauf que là les suédois se font pas attaquer par les requins.

Et puis voila il y a la Praia dos Golfinhos, littéralement la plage des dauphins, accessible seulement à marée basse tot le matin, où si vous êtes chanceux (et si vous avez suivi mon voyage, vous savez que je n'ai pas à me plaindre de ce côté là) vous pouvez nager au milieu des dauphins.
Bon on est pas à Sea World non plus, il n'y pas de jolie blonde en combinaison moulante qui leur fait faire des saltos avec un sifflet, mais le simple fait de les voir sortir de l'eau à moins de 2 mètres de vous vous fait replonger en enfance, quand votre rêve ultime était de nager avec les dauphins.
Je peux donc rayer cette chose de ma To Do List, et vous connaissez maintenant l'adresse pour faire de même. Dites leurs que vous venez de ma part.

Bon l'aspect purement factuel des choses étant maintenant réglée, on peut passer au gros choc, au spectaculaire, à la rencontre ultime qui rendrait ridicules Robin Williams et Matt Damon dans Will Hunting.
C'est l'heure de narrer les peut être ultimes mots d'un homme qui va bientôt mourir et dont j'aurais été l'invraisemblable témoin pendant quelques heures d'un après midi nuageux.
Car si j'ai fait de nombreuses rencontres auparavant qui m'ont toutes, en un sens, bouleversé, à des degrés plus ou moins divers, je pense que celle là restera gravée pour très longtemps.
Attention, ça commence.

Praia do Amor - Praia da Pipa - 3 Décembre 2010

Aujourd'hui, première sortie à Praia da Pipa. Je me balade sur la plage, me pose au soleil, allume une clope.
A peine 3 minutes plus tard, un vieux type, barbe blanche et cheveux décolorés par le seul et soleil, vient vers moi. On discute vite fait, mon portugais s'améliorant on arrive à parler d'un peu de tout. Jusqu'à parler musique.
Je lui dit que je joue de la guitare. Il me demande si je suis musicien. Ne sachant pas trop quoi répondre, je dis que oui, plus ou moins. Il y a de la malice dans ses yeux et je ne sais pas trop ce que ça veut dire.
Il m'invite à le suivre, il a une guitare chez lui, sa maison est une sorte de bingalow à quelques mètres de là. Il vit retranché là, dans un coin paumé d'une des plages les plus paumées de Pipa. Bref je n'avais normalement aucune chance de le croiser, encore moins de lui parler, encore moins d'être invité chez lui. Mais bon je suis dans les petits papiers du destin et au final plus rien ne m'étonne vraiment maintenant.
Donc on arrive chez lui, il m'invite a m'asseoir, va chercher la guitare et me la tend. Je commence à jouer un truc à la con, et d'un coup le type me reprend la guitare des mains. Il enchaine sur un solo de blues, du genre il pourrait boire une bière de la main droite, fumer de la gauche et jouer avec ses pieds que ça sonnerait pas différemment.
Il me rend ensuite la guitare et me dit : "Tu m'avais dit que tu étais musicien, t'es pas musicien en fait !?"
Effectivement, vu comme ça, je suis le gamin de 5 ans qui réussit à peine à jouer Jeux Interdits sans fausses notes pour la première fois.
Il commence alors à essayer de m'expliquer quelques astuces mais ça va trop vite pour moi et il se décourage rapidement.
Il repose la guitare et commence à fumer clopes sur clopes. Entre chaque il me glisse d'un air grave : "Je vais mourir", le tout entrecoupé de suffocations. Le type ne bluff pas, il a l'air d'être sur la fin...
Et s'il allait mourir là juste sous mes yeux ? Il faut que je prenne toute la sagesse de cet homme avant que la faucheuse vienne allumer sa dernière cig.
Il commence à me parler de sa vie. Je lui demande d'où il sait jouer comme ça, il me répond : "Oh, quand Mike Jagger te demande de progresser pour pouvoir jouer avec lui, tu fais ce qu'il faut pour être au niveau..."
Première info : il a joué avec Mike Jagger. Au Brésil, et à New York. Ok.
"J'ai rencontré Bob Marley aussi, il est venu ici prendre des vacances. Quand j'ai serré sa main, j'ai senti une telle énergie que j'ai tout de suite compris que ce gars là était différent..."
Il allie le geste à la parole et me serre la main. Et là je me dis que je vis un moment incroyable. Je suis en train de serrer une main qui des années auparavant a serré celle de Mike Jagger et celle de Bob Marley. Inutile de dire que j'ai secoué la main du bonhomme pendant de longues secondes.
Je bois ses mots comme écoutant une prophétie. Il me pose des questions sur moi, sur ma famille, mes buts, mes origines... J'essaye de répondre avec honnêteté, car de toute façon je n'arrive pas à cacher quoi que ce soit à cet homme.
Il me dit que l'honnêteté est la clé de tout, qu'un homme honnête ne peut pas être mauvais. Il est persuadé que chacun peut réussir.
"Si tu fais quelque chose, fais le, n'essaye pas de le faire. Fais le jusqu'au bout, fais le fort, crois y et sois honnête avec toi et avec les autres."
Soudain, alors que nous sommes maintenant assis sur le sable à coté de sa maison, à regarder les vagues qui s'abattent sur les rochers, je crois parler à Yoda.
"Fais une chose ou ne le fais pas. Il n'y a pas d'essai."
Chacun de ses mots a l'air si vrai, si emprunt de sagesse. Ce type est en train de souffler sans le savoir sur les nuages qui assombrissaient mon monde.
Il m'invite à regarder les vagues, à comprendre la magie de leur création et de leur destruction, à comprendre la liberté du surfer qui apprend à vivre avec elles. C'est vrai qu'on pourrait passer une vie à regarder les vagues... Certains choses deviennent si simple quand on vous donne enfin le mode d'emploi.
A ce moment là je sors mon carnet et commence à écrire. Je ne veux rien oublier de cette rencontre, je veux graver sur le papier chacun de ses mots, car à ce moment là je sens que c'est une des ces rencontres qui peuvent changer une vie.
"Ah tu écris ?"
"Oui, j'écris sur mon voyage, mes rencontres, mes impressions. J'espère pouvoir utiliser tout ça comme base pour un livre que j'ai commencé à écrire."
"C'est bien, n'arrête jamais d'écrire, tu m'entends ? Jamais. Parce qu'un jour les pages se transforment en histoires, les histoires en livres, les livres en succès."
"Vous écrivez ?"
"Je suis en train d'écrire mon second livre, il devrait être adapté en film. Le premier a été vendu à 190 000 exemplaires..."
Ok, ce type sait donc tout faire, et ses mots prennent d'autant plus de sens.
Il me raconte qu'au début il était batteur, mais un accident de moto lui a fracturé les deux genoux et lui a coûté toutes ses dents du haut. A cause des genoux il n'a plus jamais pu jouer de batterie. Il s'est donc mis à la guitare...
Il me redit qu'il va mourir, comme s'il était désolé pour ça. Mais je peux pas y croire, cet homme qui a tant vécu ne peut pas s'éteindre sur une plage.
"Ce serait une belle mort..." Oui, sans doute...
"L'important, c'est de vivre ta vie, de la vivre bien, parce que c'est la seule que tu auras, alors ne perd pas ton temps, fais les choses, fais les bien. Profite de tous les moyens qui s'offrent à toi pour accomplir quelque chose. Prends l'argent qu'on te donne, gagne-en si tu peux, ne refuse rien par principe, tu n'a pas le temps pour ça... Continue d'écrire, fais de la guitare si tu veux, mais fais le pour devenir bon, par pour le principe de savoir jouer. Même si je pense que c'est déjà trop tard pour toi, si tu veux le faire, fais le.
L'important pour un artiste, ce n'est pas l'argent, ce n'est pas la célébrité, ce n'est pas la débauche et les femmes, l'important c'est de trouver des gens qui te diront : j'aime ce que tu fais. De devenir meilleur pour qu'il y en ai de plus en plus..."
Je ne peux pas dire un mot, il n'y a rien à dire, rien à ajouter. Il met chaque mot dans le mille, comme s'il savait à l'avance qu'il allait me rencontrer.
Je reste la comme un con à regarder les vagues, et chacun de ses mots les rend plus belles.
Accessoirement, il est aussi peintre, a 3 maisons à Pipa, une à Rio, à un bateau avec lequel il allait du Brésil à Miami, juste comme ça.
Il finit mon paquet de cigarettes, moi je n'ai même pas fumé. Je suis juste dans un autre monde et je n'arrive pas à redescendre.
Il se lève et je comprends alors que la leçon est finie. Il veut me payer pour les cigarettes et je refuse.
Il me dit : "Mais t'inquiètes pas, j'ai de l'argent, je fabrique de la cire pour les surfs (surf wax), j'en vends plusieurs centaines toutes les semaines à 1€ pièce..." le tout avec un grand sourire découvrant sa bouche vide de dents...
"Avec quoi vous fabriquez ça ?"
"C'est un secret..."
Il me donne l'accolade en me disant qu'il espère que son message aura pu m'aider ou m'apporter quelque chose. Je crois qu'il ne sait pas à quel point, en effet.
Je repars alors pour l'auberge en regardant une dernière fois les vagues dorées par le soleil couchant, le sourire aux lèvres.
A ce moment là je sais que tout le reste de mon voyage sera du bonus. J'ai trouvé, ici, sur une plage isolée de l'Est brésilien, une grande partie des réponses que j'étais parti chercher. Chacune de mes précédentes rencontres m'avaient mis sur la voie. Celle là, sous les traits d'un vieil homme, mélange entre Yoda, Bob Marley et Tyler Durden dans Fight Club, m'aura définitivement ouvert les yeux.
Quand je quitte la plage j'ai juste envie de prendre un avion et de rentrer chez moi. Comme une manière de dire au destin : j'avoue j'ai fuit, mais maintenant je suis prêt à rentrer et à faire face. Mais pas tout de suite, pas encore.
Car maintenant je ne cours plus après quelque chose avec l'absolue nécessité de la trouver pour légitimer ma décision de partir. Maintenant je sais pourquoi je suis parti, maintenant je sais pourquoi j'ai envie de revenir. 
Désormais je suis libre.

Pour l'anecdote, j'ai vérifié sur Internet si le mec disait vrai (il m'a donné son prénom & nom), et il m'a menti sur rien. True story.

Les écrits ci dessus ne sont qu'un bref résumé de toute notre conversation qui a duré presque 4 heures. Je n'ai pas pu tout écrire directement donc j'ai fait le reste de mémoire et j'ai surement oublié d'autres choses.

Ce que je retiendrai c'est qu'au delà des mots, j'ai réellement RESSENTI que quelque chose se passait. Quelque chose de différent qu'une simple conversation. Je n'irai pas jusqu'à parler de métaphysique mais ce n'est pas l'envie qui manque.
C'est comme si je me rencontrais moi, avec 40 ans de plus, avec la sagesse et l'expérience qui en découlent, capable d'expliquer à mon jeune moi ce qu'il faut faire et ne pas faire, comment il faut penser, comment il faut s'accomplir. Chacun de ses mots a trouvé en moi un écho comme jamais personne n'avait pu le faire dans ma vie entière.

7.12.10

Photos - Jericoacoara Suite

Voila la suite des photos de Jericoacoara... La galerie complète est toujours disponible sur la page éponyme







5.12.10

Photos - Fin Belem / Debut Jericoacoara

Bon voila les dernières photos de Belem et les premières photos de Jericoacoara... J'essaye d'accélérer le pas mais je crois que j'ai déja une ville de retard au niveau des retouches/mise en ligne...
Bref, vos commentaires sont les bienvenus, comme d'habitude.
Le diaporama de Jericoacoara est disponible sur la page des galeries photos, et sera mis à jour au fur et à mesure.






3.12.10

Carnet de Bord - Belem, Sao Luis, Jericoacoara, le "Gay Trap" et le "6 Reals Place"

Bon et bien finalement je me décide à prendre le temps d'écrire quelque chose. Ça faisait longtemps que je n'avais pas mis le carnet de bord à jour alors je vous dois bien ça.
Mais bon il faut dire que depuis mon départ de Belem je n'ai pas eu trop le temps de me poser, encore moins d'utiliser l'ordinateur, ceci explique cela.

Clôturons tout d'abord le chapitre Belem...
Les derniers jours n'ont pas beaucoup différé des premiers, je n'ai pas fait grand chose, profitant du petit confort de l'apart de Laure et Pierre et avec une pointe de nostalgie pour alibi...
Faits marquant : je suis toujours aussi bon au tarot, le marché du Dimanche place de la République est super sympa, les bières du Bar do Parque sont toujours aussi dégueulasses.
Le groupe d'expatriés français que j'avais intégré était ma foi fort sympathique, à ceci près que la plupart parlait très (trop) souvent de bois, de combien il coute et de combien il rapporte, de ce qu'il est légal ou pas de faire ou de ne pas faire et des choses comme ça...
J'ai rapidement compris une chose, hormis Bruno, le photographe, et Pierre et Laure, tous les français que j'ai rencontré à Belem étaient là pour faire du fric. Et tous arrivaient plus ou moins à en faire de manière plus ou moins légale. Les soirées entourés de ces gens là tournaient bien souvent à la réunion de travail, ça parlait tarifs, rentabilité, délais, nouveaux marchés... Bruno et moi avons souvent commandé d'autres bières dans ces moments là.
Par ailleurs ça ne les empêchait pas d'êtres des gens très sympas même si parfois redondants...

Il faudra aussi se souvenir des parties de foot en salle du Mardi soir, qui m'ont couté l'ongle de mon gros orteil et environ 5 litres de sueur par séance.
La ville en elle même est très sympa, arborée, et la vieille ville vaut assurément le coup d'œil.

Il était donc temps après un mois passé là bas d'accélérer le pas et de descendre vers le sud, avec comme premier point de chute Sao Luis, dite capitale brésilienne du reggae...
Comme introduction, un petit truc écrit dans le bus entre Belem et Sao Luis :

24 Novembre 2010 - Bus pour Sao Luis

Encore une chanson d'écrite. Décidément les transports en commun brésiliens inspirent mes mots... En revanche leurs routes ne facilitent pas la relecture.
Je quitte Belem après un mois passé là bas. Force est de constater que le temps passe toujours aussi vite, et pourtant je n'ai pas foutu grand chose.
Incapable de me réveiller le matin, parce qu'incapable de m'endormir le soir, j'ai retrouvé à Belem cette chose qui me caractérisait tant en France : le refus d'accepter qu'un nouveau jour se lève...
C'est dans ces moments que je me rends compte que ce concept de "date de péremption" comme j'aime souvent le dire, est aussi valable à l'étranger. Cela correspond dans mon cas à dire que je ne sais agir que quand je sais que les jours/heures/minutes me sont comptées.
C'est profondément aberrant mais je vous prierai tout de même de ne pas me jeter de cailloux.
Est-ce de la procrastination élevée au rang de mode de vie ? Une envie profonde de se la couler douce d'une main tout en levant au monde le majeur de l'autre ?
Je ne sais pas mais toujours est-il que le soleil de Belem n'a pas beaucoup vu mon nez.
Ah ça par contre le soir, je ne dis pas non.
Un bar, des bières, des filles... C'est un autre panorama.
En fait, plus rapide : le soir, c'est un autre panorama.
Plus ça va et plus je me sens oiseau de nuit, chasseur rodant au milieu de mes dégénérés semblables, déambulant sous l'effervescence de la pleine lune.
Oui car autant le jour vous êtes forcés de côtoyer des gens de tous horizons et de toute humeur, autant la nuit tout le monde est pareil.
A Belem j'ai vu des avocats renommés flirter avec des putes que je ne toucherais même pas avec un bâton (© Clement Naudy). J'ai vu un ancien photographe de mode fameux immortaliser nos têtes ahuries à 6h du matin à la terrasse du bar le plus craignos de Belem, avec un appareil dont la valeur seule pourrait financer 1 an supplémentaire de voyage...
Si on pourrait penser qu'on peut voir ça en France, on peut assurément dire qu'on ne voit ça que la nuit.
La nuit les gens ne se cachent plus, on les voit tels qu'ils sont. La nuit est synonyme de liberté, c'est pour ça que je m'y sens bien.
J'arrive donc à Sao Luis sur les coups de midi, réveille un taxi qui faisait sa sieste sur le parking et nous voila parti pour ma première auberge de jeunesse.
Le taxi se prend pour Sebastien Loeb, roule sur les trottoirs, tape des freins a main, tout en se marrant et en sifflant après la moindre entité féminine qu'il croise. Un vrai porc quoi.
Je me demande si je vais mourir à ce moment là. J'ai tellement peur de la suite, de me retrouver tout seul, après avoir connu les délires de Macapa et Belem, qu'au final je prends gout à sa conduite. J'attends presque l'accident, une jambe cassée, un traumatisme crânien, et je rentre à la maison, sans me préoccuper d'une excuse...
Mais le type a le don de rouler comme un jacky sans pour autant emboutir quoi que ce soit. Traitre.
J'arrive à l'auberge, presque désespérément vide. Je viens de me taper 12 heures de bus, j'estime qu'une sieste ne peut pas me faire de mal.
A mon réveil je fais la connaissance de Marc, un Irlandais qui voyage avec sa copine, Elsa, française. Rapidement on discute, je lui fais part de mon désir d'aller aux Lençois (parc national de dunes et lagons, normalement magnifique), et me dit que deux personnes de l'auberge en sont rentrés hier en disant qu'il n'y avait d'eau nulle part, et que cela revenait plutôt à visiter un mini Sahara, et que pour le prix de l'expédition ça n'en valait pas la peine.
OK, première nouvelle et premier changement de programme. Il me dit qu'ils ont eux prévu d'aller sur Jericoacoara, une espèce de station balnéaire paumée sur la côte entre Sao Luis et Fortaleza. Je lui propose de me joindre à eux. Pas de problème. Bonne nouvelle.
Le départ est prévu pour le lendemain matin à l'aube. Il faut donc que je profite du temps qu'il reste pour voir à quoi ressemble Sao Luis, et il faut également que je trouve un distributeur HSBC parce qu'il n'y aucune banque à Jeri (le petit nom de Jericoacoara, oui nous sommes déja intimes)
Je m'achète de quoi manger et commence à me balader, la ville est disons assez sale, pas si jolie, au final. L'intéret réside dans les rues vallonnées du centre, pleines de charmes mais sans réelle vie. Je cherche en vain à écouter un peu de Reggae, tout du moins trouver des mecs jouant dans la rue. Mais pour une ville qui s'en dit la capitale, c'est ridicule. A ce moment là Montpellier est la capitale de la musique de rue et les Koundelitch sont les Beattles.
Bref je rentre à l'hôtel super déçu et j'attends l'heure du diner en me disant que la nuit est peut être plus agitée. Mais en fait non.
Je vais m'installer dans un restau à une rue de l'auberge, et je tombe sur un groupe de 4 français, vers la 50aine bien tassée chacun. J'avais croisé deux d'entre eux dans le bus venant de Belem, drole de coïncidence. On discute de tout et de rien, et après quelques caïpirowska je rentre dormir à l'auberge parce que le réveil pour se révéler difficile.
Je vais me coucher et dans mon lit superposé, celui du haut est occupé par un bedonnant chilien. Le mec ronfle, mais même un orchestre de cuivres pourrait pas rivaliser. J'hallucine totalement, je crois que je n'ai JAMAIS entendu ça de toute ma vie. Même mes boulkyès n'y pourront rien changer, il va falloir que je le tue, ou que je renonce à mon sommeil.
Je n'ai pas pu le tuer.
C'est donc après une bonne nuit blanche des familles que nous prenons le bus direction Camocim, une petite ville à 2 heures de route de Jeri. Il n'y a plus de route asphaltée pour continuer après, nous sommes donc forcés de nous arrêter la.
Nous arrivons à 21h, il n'y a plus de pickup pour aller sur Jeri, on va donc devoir passer la nuit là.

25 Novembre 2010, dans le bus pour Camocim

" Parmi d'autres choses, j'ai fait un rêve incroyable dans le bus.
Je voyage avec un couple, une française et un irlandais rencontrés la veille à Sao Luis, voilà pour la mise en place.
Donc dans ce rêve je me réveille en sursaut dans un appartement que je ne connais pas mais très lumineux et très blanc. Je suis dans le salon. Je ne me souviens plus précisément qui est là mais je suis à peu près sur qu'il y avait mon frère et ma sœur.
Bref je leur demande ce que je fais là et ils me répondent : à ton avis ?
Je ne comprends pas. Je leur dis : - Putin mais où sont les autres ? - Quels autres ? - Et ben j'étais avec un irlandais et une française, dans un bus, pourquoi je suis là ?
Ils ne me répondent pas et se contentent de sourire.
Plusieurs hypothèses :
  • j'ai effectivement fait le chemin avec le couple mais c'était dans le passé et ce n'était qu'un souvenir.
  • la française et l'irlandais n'existent pas, pas plus que le bus et j'étais en train de rêver.
  • l'endroit où je suis n'existe pas et je rêve depuis la réalité du bus.
  • je suis mort dans le bus et je suis dans une sorte de paradis
Un grand moment de doute et puis le rêve se transforme en rêve lucide quand je décide de tout casser dans la pièce pour voir si je suis bien en train de rêver ou non.
Je connais le mobilier puisque c'est celui de ma maison. Et puis je vois le piano et je ne peux pas le casser. Je m'installe et commence à jouer pendant qu'autour de moi tout vole en éclats.
En revanche je ne me souviens pas comment le rêve s'arrête, juste de reprendre conscience dans le bus en semi état de choc,
le genre d'état ou vous regardez tout autour de vous à une vitesse folle pour vérifier que tout le monde est bien là et que rien n'a changé.
Je vois ce rêve comme une allégorie. J'ai cassé dans le rêve une partie des éléments matériels qui me rattachaient à mon chez moi, comme pour mieux accepter de l'avoir quitté dans la réalité...
Nous voici donc partis à l'aventure cherchant une pousada pas cher pour passer la nuit dans Camocim City, sa plage, ses cocotiers, et... euh voila.
On rentre dans une première, c'est pas cher, on demande à voir les chambres. La femme ouvre la porte, et la on éclate de rires tous les 3. Pour vous faire un topo il y avait un coton tige usagé sur le lit, une capote (usagée peut être mais on n'a pas cherché à savoir) par terre, un flot de fourmis au mur et on a pas voulu voir plus loin.
Merci au revoir, nous revoilà dans la rue.
La deuxième sera la bonne, ce n'est ni le grand confort, ni le grand luxe, mais à défaut d'être attrayant c'est un minimum propre.
Elsa va se coucher, l'opportunité pour Marc de s'enfiler quelques bières sans provoquer de regards accusateurs. On s'installe donc à une table sur la place à coté et se boit quelques bières histoire de faire plus ample connaissance.
On se marre bien et une fois un peu éméchés on va se coucher.
Le lendemain réveil à 8h, on a entendu dire que le pickup pour Jeri part à 9h30. On va au point de rendez vous, personne. On demande à tous les commerces autour, personne n'a la même version, ni les mêmes idées du prix ou de l'horaire d'arrivée. Bref c'est la merde.
On s'installe sur un banc sous la cagnard, et on commence à attendre. Finalement le pickup arrivera à 11h. Mais ne repartira qu'à 12h30. 
Au final presque 4 heures d'attente sous un soleil de plomb, comme pour mieux commencer le bronzage avant la plage.

La suite par contre vend du rêve. Départ à l'arrière du pickup, on commence par traverser un bras de mer sur un bac, première vue du sable blanc et des planches à voile. 
Après c'est 2h de trajet à longer la plage, avec des paysages de nature vierge à couper le souffle, des mangroves sèches magnifique, et l'arrivée sur Jeri en point d'orgue.
Le couple prend la première pousada, complète pour moi. Je vais donc dans une autre auberge de jeunesse, tenue par le désormais mythique "German guy", Wolfgang de son petit nom.
Là je fais la connaissance de Charlie, un ougandais qui vit à Londres, Jalaina une brésilienne de Sao Paulo, et Roel, un belge de Flandre. Ca se marre bien d'entrée de jeu, l'ambiance a l'air cool, bonne pioche.
J'ai fait presque 40 heures de bus en 3 jours depuis mon départ de Belem, et maintenant je déambule les pieds dans le sable (pas de rue pavée à Jeri, que du sable, partout, le top !) sous un soleil de plomb avec de l'eau turquoise en ligne de mire. Quel changement.
Je décide de ne pas dormir et on va manger tous ensemble. Ensuite, digestion sur la plage, jusqu'au couché de soleil qui ici a la particularité de se coucher "dans la mer". Le spectacle est magnifique.
Une énorme dune surplombe la ville, et vers 17h les gens commencent à y grimper pour admirer le couché de soleil. C'est quelque chose à voir. On dirait l'exode des Juifs depuis l'Egypte, et à tout moment on s'attend à voir un mec barbu planter un bateau dans l'eau pour ouvrir la mer en deux. Mais en fait non.
Après le couché de soleil, tout le monde se presse autour de la roda de copoeira, un grand cercle tracé sur la plage, avec les capoeiristas au milieu. Super spectacle avec les couleurs du Soleil rasant, première fois que je vois de la Capoeira au Brésil, le lieu s'y prête à merveille.
Ensuite rue principale est bordée de stands où des types vous préparent tous les cocktails que vous pouvez imaginer. Le moins cher : la caïpirinha bien sur, seulement 3 Reals le verre (un peu plus d'1€), et inutile dire qu'ils font pas les rapias sur l'alcool. Moi je préfère au final la caïpirowska, ça coute à peine plus cher mais la vodka me manquait, et la nostalgie n'a pas de prix. Comble du luxe, je me permets d'y rajouter du kiwi, pour les vitamines.
Caïrowska : Vodka - 1 citron vert entier coupés en quartiers - une bonne cuiller à soupe de sucre en poudre - glace pilée
Caïpirinha : même chose avec de la Cachaça à la place de la vodka.
Bref on a vite fait d'être sec si on fait pas gaffe, ce qui ne tarde pas à arriver.

On décide de continuer la fête dans une sorte de bar musical à 2 pas de là. On danse, on se marre, l'irlandais envoie des pas de danse venus de l'espace Guiness Powered, Charlie négocie totalement déchiré avec le DJ pour qu'il troc son Lady Gaga contre du bon son rap old school, toujours bon à prendre.
On finit par se poser au bar, va savoir pourquoi un couple de brésiliens décide de nous rincer Roel et moi avec bières à volonté. Très bien, je ne refuse jamais un cadeau.
Je fais une pause clope, le gérant du bar commence à venir me parler en portugais, et me demande grosso modo de venir derrière le bar en me tendant une bière.
Comme dit précédemment je ne refuse jamais un cadeau, j'arrive derrière le bar et le mec commence à gueuler : OK this guy is my boss now.
Ok pour ma première soirée ici je me retrouve donc serveur/barman du bar le plus bondé de la rue. Pas de soucis, appelez moi MacGyver. Au début je ne fais que sortir les bières du frigo, après je commence à servir les bières, après je commence à encaisser les sous, et je finis par apprendre à faire les cocktails... Pendant 1 heure je fais tourner la boutique, les autres sont morts de rire et m'encouragent.
Je bois à l'oeil, puisque le mec me tend les fins de bière de tout le monde, je suis déjà à 8g et la nuit n'est pas finie.
Le type me remercie, et nous propose à Charlie et moi, de le suivre pour aller dans une soirée privée où ça risque de bien bouger. Ok pourquoi pas.
Sauf qu'en premier lieu il doit passer à sa pousada pour faire je ne sais quoi. On arrive donc là bas, et là le constat est officiel, il devait y avoir un panneau "Pousada Gay" à l'entrée que nous n'avons pas vu.
3 mecs sont en train de manger, du genre prototype du gay. Avec Charlie on sent l'embrouille arriver et on trouve rapidement une feinte pour s'esquiver de là. Ce moment restera scellé sous le nom de "Gay Trap" et on devrait bientôt breveter l'expression.
On finit par rentrer à l'auberge, il sort une bouteille de Rhum Cubain, délicieux, et on se boit un petit verre alors que le soleil se lève. 
Une journée dantesque, presque iréelle, je vais me coucher le sourire aux lèvres, pour une fois impatient que le soleil se lève.

Je découvre ensuite ce qui deviendra le légendaire "6 Reals Place" alias un mini resto où j'ai mangé 2 fois par jour pendant 4 jours. Pour 3€50 vous avez une assiette bien remplie de riz, spaghetti, haricots, farofa (farine de manioc, pas mauvais), salade et légumes + une pièce de steak et oignons ou une pièce de poulet. Bref rapport qualité prix imbattable et élue cantine officielle de l'auberge.

Ensuite les jours se suivent et se ressemblent, petit dej le matin, rienfoutage jusqu'au midi, repas du midi, farniente sur la plage jusqu'au coucher de soleil, capoeira, cocktails, repas du soir, cocktails, dodo. Mais que c'est bon...

30 Novembre 2010 - Jeri
"Dernière journée à Jeri. Allongé dans mon hamac, au moins 30 degrés dehors, une légère brise caressant ma peau enfin tannée par le soleil... Cet endroit n'est pas réel, pas plus que les soirées passées ici, pas plus que les gens qui le peuplent. Cet endroit est un paradis perdu qui se défait et se reconstruit chaque jour sous nos yeux rêveurs. On pourrait rester une vie ici sans s'en rendre compte."

J'avais prévu de rester 3 jours là bas, finalement j'y resterai 5 et je n'avais même pas envie de partir... Je n'avais juste plus de cash et pas envie de faire un allez retour pour en avoir de nouveau, il a fallu partir.

20 heures de bus plus tard, me voilà à Praia da Pipa, un autre lieu de plages et de fiestas fortement recommandé par Roel. Dans 2 heures j'irai me poser sur la plage, stylo et carnet en main (j'ai un livre à continuer d'écrire je vous le rappelle) appareil photo dans le sac, je vous en dirai bientôt des nouvelles...

Photos de Belem/Jeri à venir bientôt.